Nema probema, de Laura Forti. Mise en scène Alain Batis

Promis a une belle carrière de photographe, un Milanais flambeur de 23 ans admire Charlie Parker, dont le morceau « Lover Man » le fait vibrer. L’Expresso a déjà publié plusieurs de ses photos, à la grande satisfaction de son père. Au moment de la guerre en Croatie, à 500 kilomètres de chez lui, il part voir ses grands parents croates. Pour que ceux-ci puissent partir en Italie, il reste combattre aux côtés des autorités croates l’armée serbe solidement constituée. Comme il parle à peine la langue, « Nema problema » est l’expression qu’il utilise pour dire « je suis encore en vie, ça va ! »

Un jeune saxophoniste et un acteur d’âge mûr se partagent la scène : le premier incarne le jeune-homme innocent, le second l’homme prématurément vieilli qui rentre de six mois de conflit le visage abîmé, les yeux caves, meurtri dans sa solitude. Le texte pose des questions éthiques : faut-il écouter les pacifistes ou prendre les armes lorsque des innocents sont massacrés ? Est-il possible de se distraire de sa douleur une fois qu’on a vu tant de morts ?

Raphaël Almosni est sobre, il parle vite, se répète, dans une confession qui ne peut manquer d’émouvoir le public jusqu’aux tripes. Il raconte la guerre dans son horreur, les charniers épars, les snipers, les pillages, les viols. Le saxophone de Stanislas de Nussac (alternant ténor et soprano) se pose tantôt dans les silences, tantôt sur sa voix, vibrations de sons clairs ou âpres avec des couacs, parfois, pour figurer les impacts des balles. Finalement, c’est peut-être le jazz, à travers la virtuosité de Charlie Parker, qui rendra à l’homme meurtri une touche de jeunesse et d’innocence…

2010

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