Entre autres bons spectacles, le festival des clowns, des burlesques et des excentriques révélait, en première partie d’Amamouche, un excellent duo, les Paraconteurs, mis en scène par Alexandre Pavlata, vu en Franky O’Right, qui commet avec eux d’étonnants happenings. Si ça ne dure qu’une demi-heure, les trois sketchs posent un style assuré. Au départ, deux quidams se battent pour un billet qu’on imagine de loterie. Ils se l’arrachent, se le reprennent, se le rendent jusqu’à que le sésame finisse en miettes, comme on s’y attendait. Et c’est reparti avec un cigare pour lequel ils s’étripent de la même façon.
Alternativement, Eric Druel et Mathieu Van Berchem échangent leurs rôles de clown blanc et d’auguste. Dans la deuxième saynète où ils assistent à un enterrement, face au petit qui affiche une affliction de circonstance, le grand si sérieux devient ce benêt ignorant de la façon de se tenir en pareille occasion. Alors il mime la commisération feinte par son camarade, hausse les épaules d’un air gêné en fixant l’urne de cendres, qui va finir secouée, renversée, dispersée. Aucun mot n’est prononcé, à part ces « oui, oui, non, non » au téléphone, chargés de cette foule de sentiments mêlés que provoque la nouvelle d’un décès : douleur, empathie, désarroi… Le troisième tableau montre, sur une jolie musique d’Erik Satie, deux anges évoluant au ralenti dans un paradis vide, le premier indisposé par la compagnie exaspérante de l’autre.
Eric Druel et Mathieu Van Berchem forment un duo complémentaire et efficace. Leurs mimiques sont retenues et leurs visages d’autant plus expressifs que l’accoutrement est sobre. La tête espiègle d’Eric Druel complète l’expression sévère de Mathieu Van Berchem au faux air d’André Breton. Pas un dialogue ne perturbe l’art mimé et rythmé de ces « pas raconteurs », dont le déroulement crescendo avance vers un climax attendu mais jouissif.