Ils sont trois Suisses, jeunes et fringants, qui vulgarisent le chant lyrique et le répertoire classique avec brio : Davide Autieri en baryton meneur de troupe, orateur décalé à la Édouard Baer, Leana Durney, en soprano à l’organe clair et vibrant qui n’hésite pas à remonter sa jupe pour montrer une gambette bien dessinée, et le taciturne pianiste Guy-François Leuenberger, doigts agiles et regard éberlué.
Avec peu de moyens et beaucoup d’esprit, durant une heure et quart, ils rendent hommage à l’opéra et le rendent accessible de façon humoristique, à la différence du pédagogue Jean-François Ziegel. De l’opérette au grand opéra, tous les styles sont traités : l’opéra classique de Mozart ou Pergolèse, le grand opéra français de Massenet, le bel canto de Bellini, l’opérette d’Offenbach, de Messager ou de Simons, mais aussi Rossini, Wagner, Tchaïkovski… Avec, en prime, un remix variet’ du tube lyrique « Adieu notre petite table » et une interprétation de Don Giovani et Zerlina, « identique, mouvement par mouvement, geste par geste », à celle de Giorgio Strehler en 1987 à la Scala de Milan…
Morceaux lyriques et passages parlés alternent comme naturellement. Davide se lance dans des monologues égocentriques, demande qu’on crie son nom, critique la diction affectée des chanteurs d’opérette, Leana minaude et entonne des couplets saisissants, soutenus par la virtuosité du pianiste. Variation de rythme, de registres et de ton, jeux de scènes et grimaces, parodies d’accents font mouche auprès du public. Ceux qui n’aiment pas l’opéra sont divertis, les amateurs sont comblés. Loin des soirées guindées à Garnier, l’opéra de quartier a sans doute de beaux jours devant lui.