Comme son titre l’indique, Kalashnikov est une pièce trash, une comédie dramatique aux airs de chronique de la vie quotidienne. Celle d’un couple de Bidochons sans passion affalés sur le canapé, qui regardent Mac Giver et Laurence Ferrarri, cette « présentatrice blonde aux dents blanches ». Lorsque leur fils revient de la guerre, ils n’ont pas un mot pour l’accueillir. On pense aux Cadouins ou à Dieu habite Düsseldorf, pour l’ambiance franchouillarde et déprimante.
En fait, Kalashnikov est un remix actuel du mythe d’Oedipe : le fils va tuer le père et épouser sa mère, le chœur étant joué par un transsexuel reubeu à qui ont dit « sale arabe », « sale pédé », ou encore « vieille pute arabe », dans une prolifération de répliques racistes, comme s’il fallait chercher l’outrance. Mais la mise en scène de Pierre Notte est très réussie.
Petit à petit la pièce se délite et part dans tous les sens. La critique sociale du début se dissout dans un bordel où demeurent seuls les acteurs, en particulier l’excellent Yann de Monterno vu en cowboy scato dans la Taverne Münchhausen (le père), Raphaëline Goupilleau (la mère), ou le trans joué par Annick le Goff. On est moins convaincu par l’enfant estropié (Cyrille Thouvenin) qui rampe en laissant une traînée de lymphe au sol comme un escargot.
Au fond, la pièce de Stéphane Guérin est peut-être un brin trop bavarde, ne ménageant pas assez de silences pour que résonne pleinement l’absurde et le tragique de la situation. Reste que c’est vif, acerbe, et surtout très contemporain…