Il serait dommage de réduire Isabelle Vitari à son rôle récurrent dans Nos chers voisins ou Seconde Chance, le Plus belle la vie tenté par TF1 en 2008-2009. Sur la scène du petit Gymnase, on découvre une fille folle de jeu. De même que Bigard et David Salles se permettent tout, elle se lâche pour de vrai. Envie de suicide, hypocrisie, sexe, drogue et désespoir : il est question de tout cela dans ce show étonnant et sans tabou.
Plutôt que par une fausse transparence stand-up, c’est à travers des personnages que la comédienne se livre. Ses contradictions notamment, sautent aux yeux, quand après avoir affiché ses prétentions de fille délurée à « faire perdre une taille de bite » au jeunot qu’elle a invité chez elle, elle est dépassée par l’attitude hardcore de ce coq qui veut la « biffler ». Avec une gestuelle étudiée, elle joue une fille superficielle dans une soirée showbiz, qui fait des compliments pour en recevoir. Elle est encore saisissante de réalisme en journaliste qui enquête sur les drogues, mâchoires serrées et tics intempestifs sous coke, surprise par les modulations de sa propre voix et atteinte d’une « légère envie de mourir » sous acide.
Tout le monde en prend pour son grade : les mecs de 35 ans qui ne peuvent pas s’engager (« déjà essaie de t’engager dans ma chatte, connard ! »), l’instit’ schizo prête à virer dans la force obscure du cygne noir, ou la tragédienne du français qui se prend pour une « fille du voyage » et parle à son technicien comme à une merde… Chaque scène amène sa force tragicomique. Ainsi, cette victime de la presse mag qui s’enfile chaque matin sept Boursins pour maigrir et croit que son fils joue à « tarzan postier » quand elle le découvre tenant une lettre et une corde pour se pendre !
Comme Laurent Gérard, il semble qu’après avoir fait ses preuves au théâtre ou a la télé, Isabelle Vitari déploie dans ce premier one-woman-show un talent qui ne demandait qu’à éclore dans cette forme. L’ancienne membre du collectif les Quiches avec qui elle a réalisé la comédie Foon (2005), parodie de college movie à l’américaine façon Steak, s’est renouvelée, avec une profondeur existentielle peu courante sur la scène comique. Isabelle Vitari se met en danger dans chaque rôle et si elle est parfois cynique, ce n’est jamais gratuit. Chaque personnage a sa psychologie. On est bluffé.