Comme dans le show de Gwen Aduh également mis en scène par ses soins, la voix off de François Rollin résonne dans la salle au début du spectacle, avant l’apparition de Guy Carlier, dont la démarche claudicante, dit-il, s’apparente à une cascade. C’est grâce à Laurent Ruquier, en 1997 sur France Inter, que cet ancien directeur financier dans la peinture et la décoration a changé de métier, avant d’écrire des paroles pour Melody ou Johny Hallyday. Depuis, il a enchaîné les chroniques et publié une dizaine de livres reprenant essentiellement ses interventions dans le poste et « dans le bocal ».
C’est une autre image que le chroniqueur cherche à rendre dans ce premier « seul en scène », une confession empreinte d’amour propre et de désillusions adolescentes, à l’époque où des « Marc Lavoine de 14 ans » lui piquaient les filles qu’il était sur le point d’emballer. Pour dissoudre cette colère, Carlier convie le public à partager sa thérapie en gueulant « enculé » sur un bruitage de train, comme jadis sous un pont ferroviaire, dans un vacarme qui étouffait son insulte.
Ce faisant, Guy Carlier continue à tacler le show-biz, cette « bétaillère » qu’il a côtoyée chez Fogiel et Bern, et dont il a retiré un enseignement : pour ne pas être déçu, mieux vaut se tenir à l’écart de ses idoles, car celles-ci offrent ce qu’elles ont de meilleur dans leur activité officielle (argument que reprend Sophia Aram dans le clash qui les a opposés). Loin de cette agitation, il nous confie ses souvenirs d’un ton émouvant, tantôt grandiloquent tantôt larmoyant, sur un mode chuchoté plutôt bien trouvé. Mais ces longues périodes au passé simple et au subjonctif, tout en révélant une volonté de reconnaissance littéraire, résonnent à l’oral d’une façon un peu artificielle. Puisque Carlier a choisi de parler sur une scène, peut-être devrait-il se détacher du genre de la chronique qu’il maîtrise en effet sur le bout des doigts…
Tout en critiquant les « putes du show biz » qui saluent leur public de chaque soir comme le meilleur (ce que font effectivement les stand-upers, mais au second degré), il finit par amener sur scène son fils de quatre ans et confie être fier que dans les veines de l’enfant coule, mêlé au sien, le sang de Frédéric Dard dont il a épousé la fille. Une séquence émotion sans aucun rapport, évidemment, avec les grosses ficelles du show biz…