Ce qui frappe d’abord avec Gaspard Proust, c’est la posture d’aisance nonchalante qu’il affecte avec son public. Le comédien arrive tranquille sur scène, enlève son casque de MP3, son manteau, puis il se tâte langoureusement les muscles… Durant plus d’une heure et demie, ce Proust-là tient en halène la salle sans bouger, sans élever le ton ni sourire. Loin du stand-up – Club med et du boulevard surjoué, Gaspard Proust fait dans l’anti-jeu et demeure entièrement statique, parlant d’une voix faible, monocorde, presque déprimée (« pourquoi atteindre le nirvana, ne plus avoir de désir ? En Occident on a la dépression ! »).
Né en Slovénie, ce Suisse qui a grandi en Algérie est devenu un pur Parisien, méprisant tout et tout le monde, aussi bien le sud de la France où les gens disent « faire des petits », les pièces de Pagnol dont tous les titres se ressemblent, que les femmes. Il raconte une blague en slovène que personne ne comprend, une autre en anglais (« Stranger in the night, syphilis in the morning »), invoque l’Histoire, imaginant ce qu’aurait dit Moïse à son peuple s’il avait parlé allemand : « Raus mein Volk ! ».
Tout est distancié en lui : sa misogynie de dragueur manipulant les spectatrices, ses opinions de droite (« qui est allé vivre de l’autre côté après la chute du mur de Berlin ? »), son personnage de dandy cultivé et méprisant. Méconnu il y a peu, il vient d’intégrer l’équipe de Ruquier et pourrait vite de devenir une référence de la scène comique, son contrepoint même.