Sept ans après leur premier spectacle, et juste avant qu’ils ne partent à Avignon, Cyril Garnier et Guillaume Sentou faisaient une exceptionnelle au Théâtre du Palais Royal filmée par les caméras de France 4. Amateurs de jeux de mots habiles et de comique de situation, ils ont un univers singulier, à la fois moderne et désuet. Les voici encore plus aguerris, qui commencent par se battre à l’épée, histoire de mimer cette quête d’un combat à mener. Pas d’enfance difficile, pas de haine de la société ni d’appartenance à une communauté (à part un grand et un petit, mais bon…) : voilà juste deux gars qui sont potes depuis trente ans. Loin de ces stand-upers qui racontent « qui ils sont, d’où ils viennent, où ils vont », c’est une histoire d’amitié que narre ce spectacle très abouti.
Entre stand-up et sketchs, phases de confession et situations absurdes comme cette visite au Pôle combat, satire d’administration kafkaïenne classique mais bien jouée, ils commencent par décrire de deux points de vues distincts leur rencontre enfantine dans le jardin d’une maison de banlieue, en incarnant ces gamins qu’ils furent avec une sensibilité touchante. Puis ce sont les ados en vacances au coin du feu, le petit Sentou qui joue de la guitare et récite l’intégrale des Inconnus pendant que le grand Garnier roule des pelles aux filles – qu’ils interprètent aussi avec pas mal de finesse. Sans exagération outrancière, les comédiens tracent le portait réaliste de deux gamins normaux et accro au Nesquick, auxquels les spectateurs s’identifient facilement.
Garnier et Sentou, toujours aussi complices, ont encore gagné en assurance. Le petit grimace et son débit bien posé résonne dans la salle, quand le grand soi-disant moins charismatique se révèle petit à petit, jusqu’à se surpasser dans une plaidoirie fantasque et enlevée. Avec moins de jeux de mots qu’avant, ils se renvoient toujours la balle du tac au tac, façon Chevallier et Laspalès nouvelle génération. Bon, il y a bien deux ou trois passages un peu longs, mais les comédiens excellent dans leur propre style, sans copier personne.