Fée, seul en scène de Fred Tousch au théâtre de Belleville

Intervenant occasionnel dans l’émission radio d’Edouard Baer, Fred Tousch est avant tout un créateur prolifique, improvisateur tout terrain et brillant modérateur du cabaret philosophique. Depuis 25 ans qu’il arpente le territoire, ses festivals de rue et ses théâtres, il connaît dans la France entière des gens prêts à l’accueillir pour le gîte et le couvert. Au fil de ses nombreux spectacles, Il a été troubadour, camelot, robin des bois, rocker écoresponsable, ténor des plages, voire fleur et nous apparaît aujourd’hui transmué en fée. Certaines de ses créations portaient déjà en germes cette féerie teintée de mythologie nordique, comme l’indique le titre de son spectacle Knüt où apparaissait un « farfadet farceur ».

Il incarne ici Cristaline, une fée tombée sur la scène du théâtre de Belleville en compagnie de son albatros blessé, Polystirène. Lors de ce court passage sur Terre, celle-ci confie au public un peu de son univers peuplé de lycaons, griffons et dragons, imagine un filtre enchanteur et dévoile la véritable histoire de Cendrillon. Sa mission : supprimer la pauvreté, restaurer l’humanisme, nous faire rêver.

Comme dans la plupart de ses spectacles solo, Fred Tousch propose une alternance de récit oral d’inspiration épique et de chansons rock qui rompent le rythme de sa logorrhée lunaire. Il propose de mettre le Mont Saint-Michel sur la tête d’une biche à trois pattes, achève un pangolin qui glousse, ou joue des morceaux de metal viking dont les spectateurs entonnent en chœur le refrain, « Valhalla ». Il y a aussi, comme dans L’Oiseau bleu d’Arnaud Aymard, des télescopages surréalistes, brusques retours au réel quand la fée Cristaline évoque le quotidien de la précarité. Ainsi fait-elle apparaître un père Noël proposant des offres d’emploi pourries qu’il faut absolument refuser, comme Ulysse a résisté au chant des sirènes.

Lorrain d’origine mais installé depuis longtemps en Bretagne, le comédien a puisé dans les traditions gaéliques pour imaginer ce spectacle merveilleux. Si le costume et les compos sont au poil, certains détails ne sont pas encore parfaitement réglés, par exemple niveau son et lumière (le réglage micro ou la guirlande lumineuse). Mais comme toujours, ce sont les moments de pétage de plomb qui sont les plus savoureux, lorsque le délire verbal reprend le dessus dans une adresse enflammée au public. Comme un ouragan qui emporte tout sur son passage.

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