Dès sa création en 1993, le Cirque Éloize a contribué à populariser le nouveau cirque, notamment initié par le Cirque Plume en 1984. « Éloize », sans tréma, est un mot de patois acadien qui signifie « éclair de chaleur » aux Îles de la Madeleine dont était originaire la première troupe. Installé depuis 2004 à Montréal, Eloize présente un cirque technique et chorégraphié, de très haut niveau. Son 7e spectacle, Id, est urbain. Des graffiti recouvrent une cité futuriste enveloppée d’électro rock et de hip-hop strident ou apaisé. Sur scène, 17 artistes de 12 disciplines réalisent une synthèse entre ballet, danse hip-hop et arts du cirque, jusqu’au BMX qui dévale les marches de la grande salle de Chaillot. Pour la première fois, la compagnie utilise le multimédia et projète un décor coloré qui s’adapte au fond de scène, dont le relief cubique sert de points d’appui aux acrobates danseurs.
Dans une première séquence envoûtante, un couple danse et se porte avec une force et une sensualité oniriques… Puis la scène s’anime, dessinant un tableau urbain où défilent des passants pressés qui préfigure l’affrontement chorégraphié de deux gangs avec leur codes, leurs styles, leurs acrobaties. West Side Story revisité. Sur cette trame se tricote un show d’une incroyable énergie vitale. Des figures singulières émergent de la troupe, comme cette contorsionniste élastique et gracieuse qui se gratte la tête avec les pieds et se déplace, telle une mygale, la tête en bas.
Tout semble d’une surprenante facilité : le vélo parcourt la salle en sautillant, y compris au-dessus d’un spectateur allongé, les athlètes se dressent sur des chaises empilées, vertigineuses, sautent sur le mur de fond de scène, à pied ou à vélo, scient l’air suspendus aux rubans, aux voiles ou dans un cerceau. Le final, époustouflant, est une séquence de Tetris géant sur trampoline où chacun chute à tour de rôle, ballet de corps qui rebondissent en rythme, à l’instar d’un autre jeu vidéo des années 80, le casse-brique. La salle applaudit à tout rompre ce cirque actuel, populaire et exigeant, qui ne trahit pas l’esprit de Jean Vilar.
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