C’est un comédien sensible, fin lettré, élégant qui commence par se mettre à nu, littéralement, sur la scène de l’Atelier. Vincent Dedienne a un air de Chris Esquerre dans la diction pincée ou sa façon de pencher la tête pour souligner une gène ou un effet comique, un côté Guillaume Gallienne – qui jouait d’ailleurs sur ces mêmes planches – pour ses qualités de comédien au registre étendu. Mais il a un sens de l’absurde où l’on sent aussi l’influence de François Rollin qui l’a mis en scène, et une façon résolue de laisser ses phrases en suspens là où l’on ne s’y attend pas, une élocution précise, un peu emphatique et un vrai sens du rythme.
Vincent Dedienne aime les listes, les actrices, les beaux garçons et surtout le théâtre. Ses jeux de scène sont excellents : le comédien modernise le sketch classique à la Muriel Robin en faisant exister physiquement les personnages à qui il s’adresse. Autre trouvaille, la figure de Marie-France, sorte d’assistante virtuelle qui l’aide à s’y retrouver dans son propre spectacle.
C’est une mise à nu symbolique que traduisent sa nudité propre et ces extraits filmés où l’on découvre ses parents, puis Vincent ado jouant un sketch à 14 ans. Une autobiographie dont il ne cesse de se demander si c’est ou non un one-man-show, interrogation récurrente et très drôle qui scande le spectacle. S’il y a des sketchs, c’est la preuve que c’est un one-man-show, non ? Oui, il y en a, en premier lieu lorsqu’il s’imagine responsable d’un magasin de jouets à la sexualité ambiguë dans une ville de province.
Vincent Dedienne nous offre donc une autobiographie à la fois chronologique et déstructurée, nourrie de précisions, d’ellipses et de ruptures de rythme. Il décrit une enfance solitaire où il s’inventait des jeux à jouer seul (dont il livre un inventaire à la Prévert). A sept ans, il découvre la passion de la scène en regardant une VHS de Muriel Robin, il commence alors à écrire son spectacle qu’il aura terminé à 14 ans, puis c’est l’école de théâtre, un classique du one-man-show où il représente le prof de diction extatique et les élèves de la classe.
Passant du léger au tragique (lorsqu’il évoque la rupture amoureuse), le comédien ne quitte jamais son autodérision et livre un seul-en-scène très émouvant dont le titre, « S’il se passe quelque chose », résonne comme l’écho modifié d’une citation de Francis Bacon.
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