Souvent, le Café de la gare propose des spectacles à la bonne franquette, à voir entre potes ou en famille, comme sur scène la tribu Manesse qui tient la boutique. C’est l’un des fils, Jérémy, amateur et traducteur de mangas, qui a écrit et mis en scène aPhone, qu’il joue notamment avec son père Philippe, directeur du théâtre et Christine Anglio d’Arrête de Pleurer Pénélope. Après les commandes vocales, le temps est venu aux commandes mentales. Jouant sur l’idée d’une science-fiction futuriste où les machines nous dépassent, la pièce évoque aussi la technologie actuelle, twitter, facebook, etc .
Ça commence fort, par la conférence de presse de Steeve Niels, un personnage évoquant celui de La théorie de l’information d’Aurélien Bellanger, qui retrace l’itinéraire de Xavier Niel du Minitel à Free. Cette star du multimédia, incarnée par un Jérémy Manesse très convainquant, annonce la sortie du nouvel aPhone X qui lit dans vos pensées et envoie des messages à votre place. La démonstration est assurée par son subalterne, Philippe Manesse, au jeu burlesque toujours excellent. Dès le début, le père et le fils forment un tandem parfait, arborant cette coupole d’acier aimanté au design entre Apple et Star Treck, qu’on découvre ensuite à la ceinture des autres personnages. Tout va bien jusqu’à ce qu’un virus ne contamine l’aPhone X, avec des conséquences planétaires…
Plusieurs scènes s’intercalent dans la trame : des « JT sans Bescherelle » pétris de fautes de liaisons ; une mise en abyme avec les comédiens en répet’ ; un banquier dans sa tour de Wall street ; un braquage de banque pour 50 euros. Et puis, scène récurrente, une excellente parodie du Masque et la plume rebaptisé « Le masque et la palette graphique », où des critiques caricaturaux répètent que « c’est mauvais » et dévoilent la fin de la pièce en prétendant n’en rien faire…
Jérémy et Philippe Manesse, Christine Anglio, Odile Huleux, Benjamin Alazraki et Morgane Bontemps se démènent avec brio pour défendre cette pièce intéressante mais bancale, au côté amateur agaçant ou marrant. Il y a beaucoup d’animation sur le plateau doté d’un écran et de décors mobiles qui assurent des changements d’ambiance très rapides. Mais les scènes carrées, comme la conférence de presse inaugurale ou la confrontation façon Dragon Ball Z, alternent avec les scènes approximatives comme les flashs info. Bref, aPhone déploie un tel foisonnement matériel et conceptuel que la pièce finit par s’éparpiller.
Bon, cette alternance de passages soignés et à l’arrache fait peut-être la touche singulière et vivante du café de la gare… Car comme le dit un personnage, « le théâtre, c’est de la 3D en mieux ».