Le professeur Rollin se rebiffe

C’est en 1988, dans l’émission Palace de Jean-Michel Ribes, où il côtoyait Claude Piéplu, Jean Carmet, Ged Marlon, Valérie Lemercier ou François Morel, que François Rollin a créé le professeur Rollin. Soit un alter ego pontifiant, érudit et drôle, un personnage ridicule aux théories farfelues qu’un rien amuse, pourvu que ce soit absurde ou décalé. Sa spécialité : se perdre dans les méandres de raisonnements alambiqués en ouvrant des parenthèses à l’infini, dans une veine du soliloque humoristique qui a notamment influencé Ben et Arnaud Tsamere.

Outre cinq précédents one-man-shows et quelques livres, François Rollin a œuvré dans la presse écrite, à la radio – il a une chronique sur France Inter – et à la télévision, en participant à la création des Guignols de l’info, d’Ardimat et du grand Webzé. Sur scène, il est toujours prêt à travailler avec d’autres. Il a ainsi coécrit les spectacles d’Arnaud Tsamere, Sophie Mounicot, Chantal Ladesou, Jean-Jacques Vanier ou Fred Tousch, a mis en scène Bigard, Carlier, Gwen Aduh, a organisé une Master Class improvisée avec Fred Tousch et Arnaud Aymard, a créé le Grand Mezze avec Édouard Baer et imaginé dix performances singulières, en 2005 et 2006, à l’Européen…

Douze ans après sa « conférence sur la progression diagonale » (dans le spectacle Le professeur Rollin a encore quelque chose à dire), on retrouve ici le comédien dans sa fonction doctorale, présent sur scène pour répondre à des lettres qu’il pioche dans une brouette – et dont les auteurs, aux noms banals ou recherchés, habitent tous Brie-Comte-Robert. C’est un professeur de vie et de leçons de choses, familier de sujets aussi variés que la littérature scientifique sur la perdrix ou les politiques migratoires, la cuisine ou l’analyse picturale… Entre ses remarques avisées sur la politique ou la vie quotidienne, il fait des vannes de vieux prof poussiéreux, se laisse aller à un sourire niais devant une considération intellectuelle absconse et, parfois, ouvre grand la bouche pour se marrer. Surtout, notre cher maître tente de conter une histoire absurde qui sert de fil rouge au spectacle et dont il livre plusieurs versions : en 1957, dans les faubourgs de Cologne, une biche arrive sur un terrain vague et fait demi tour. Que peut-on en conclure ?

Les amateurs apprendront des choses sur la vie intime du professeur : que son prénom est « Professeur » (il ne précise par s’il y a une majuscule), qu’il est un grand amateur de marches militaires et qu’il déteste le paprika. Mais, lorsqu’il aborde des sujets de société comme la bien-pensance, le racisme ou l’islam, certaines réponses sont plus explicatives, voire laborieuses, que drôles. Est-on toujours au second degré ? Lors de ces considérations politiques sérieuses, longues et détaillées, on se demande si le professeur Rollin n’a pas perdu un tout petit peu de son légendaire sens de l’absurde…

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