Au croisement du cirque, du théâtre de rue et de la danse, c’est le cirque de rue qui propose aujourd’hui le théâtre le plus inventif. Il en va ainsi d' »Autochtone », la 3e création du Collectif AOC, mise en avant par le festival « Village de Cirque », comme l’année dernière Risque ZérO de la Cie Galapiat. Ce spectacle musical et moderne, sous la direction artistique de la chorégraphe Karin Vyncke, évoque aussi bien les chorégraphies de Blanca Li que le théâtre conceptuel de Pippo Delbono. On sent d’abord la rythmique de l’Américain Jules Beckman, chef de troupe au talent polymorphe, qui assure à lui seul la bande son, jouant live guitare, batterie, saxophone dont il enregistre des boucles. Sur la piste, il incarne un manager qui signe des contrats, motive les troupes avec une carotte et des formules boursières, improvise une rythmique envoûtante sur un anneau ou un bol en inox. Au début est amenée sur la piste une plateforme d’acier, toboggan où sont jetés pêle-mêle athlètes et objets ménagers dans un fracas assourdissant. La piste est constamment animée de mouvements, grouillante de ses jongleurs, athlètes, funambules accrochés au mat, à la corde, bondissant du trampoline. Des scènes symboliques ou violentes reviennent périodiquement, comme ces serrages de mains collectifs ou cette rousse frénétique qui coupe du chou rouge au hachoir. Le public est pris dans cette atmosphère étrange et sonore à la David Lynch, parabole de l’ultra libéralisme où, quand un corps tombe, les autres poursuivent leur chemin et lui marchent dessus… Plus « freestyle » que le théâtre, les ballets et le cirque, voici un spectacle aussi immédiat et naturel qu’un jeu d’enfants dans la rue.
http://www.collectifaoc.com/agenda/
Pingback: Demain je ne sais plus rien - CRITICOMIQUE